Eric Besson, le nouveau coucou du foot français Source : Bakchich– 8/11/2008
Rendu le 4 novembre, le rapport d’Éric Besson a été accueilli dans la liesse par les instances. Ses recettes ? La stratégie du coucou. A croire que le transfuge socialiste s’est encore trompé de crèmerie.
Les recettes d’Éric Besson pour améliorer les performances du foot français : la stratégie du coucou (qui fait son nid dans celui des autres)
Éric Besson, le « king » de la prospective gouvernementale a frappé. Son rapport sur les moyens d’améliorer la compétitivité des clubs de football français trône sans chichi sur le site de la Ligue de Football Professionnel (LFP). Sur ce coup-là, la démonstration de l’ex-meilleur économiste socialiste passé à la concurrence est assez clair. « Faute de biens tangibles dans un système fortement soumis à l’aléa sportif, le football professionnel français reste peu attractif pour les investisseurs ». S’en suit un long plaidoyer en faveur de la mise à disposition des clubs, d’outils de production adaptés à leur mission d’organisation de spectacles sportifs : des stades dignes de ce nom. Évidemment l’expert Besson peine parfois à contourner quelques contradictions du genre « le public manque à l’appel » ou encore la relative stagnation de la fréquentation des stades de L1 depuis 3 ans.
Stades, agents, arbitres… le vaste programme Besson
Qu’importe, il consacre plus d’un tiers de son rapport à la seule problématique du stade et des modalités de leur financement. Vaste programme en effet. Un sujet plus que « touchy » en cette période de grande disette. Surtout lorsqu’est abordée la question des partenariats public-privé qui « permettrait notamment aux collectivités locales de pouvoir –si elles le souhaitaient- financer tout ou partie des dessertes et accès au stade ». C’est vrai que les clubs possèdent peu de biens tangibles : des joueurs, des créances et du cash.
L’expert à tête de bonze confirme en une quinzaine de lignes resserrées que le patrimoine des clubs est constitué à hauteur de 75% d’immobilisations incorporelles dont 97% pour les contrats joueurs. Prudent, il se garde bien de porter un avis, voire de soulever une timide question sur leur valorisation. Après celui des comptes de l’OM pour lequel Coach Courbis va devoir se résoudre à être logé un moment aux frais du contribuable, le prochain procès des comptes du PSG lui apportera toutes les précisions utiles sur ce point…Avec Sébastien Bazin, le propriétaire américain du club parisien, il a préféré s’entretenir du Parc des Princes que des prix de transfert. C’est tellement plus consensuel.
Comme Éric Besson ne fait pas les choses à moitié, il évoque aussi quelques sujets plus sensibles mais jamais de manière polémique : le « salary cap » et l’arbitrage, la clarification des compétences entre la Ligue et la fédé… Le rôle des agents est expédié en deux pages, pas forcément élogieuses pour les parties concernées. Sauf pour la proposition de loi du sénateur Humbert qui, aux dires de l’expert Besson, répond à de légitimes objectifs de transparence et de protection des joueurs. Il a dû manquer de temps pour la lire : cette proposition loi légalise une pratique interdite, que les agents des joueurs soient rémunérés par les clubs. Bref que les intérêts d’un salarié soient défendus par un mec payé par le patron…
D’un autre côté, s’il refuse d’aborder la question de la valorisation du portefeuille-joueurs, pourquoi irait-il se gâcher le plaisir avec des sujets aussi triviaux que les véritables comptes des clubs. Rusé comme un renard, il réserve aux seuls initiés la solution qu’il y propose : « …En outre, l’indépendance de la DNCG ne pourrait être que renforcée par l’absence de tout lien structurel avec la Ligue. Le rattachement à la Fédération Française de Football (FFF) pourrait être envisagé. Mais la solution d’un rattachement direct au ministère des Sports (à l’instar d’une Haute Autorité) ou, si elle était instituée, à la DNCG Européenne, semble pertinente. »
Le football : une grande affaire de sous
Qu’en termes délicats cela est dit. On sent bien entre les lignes que l’auteur apprécie à sa juste valeur, le modèle économique du football professionnel anglais (« l’endettement n’est pas utilisé pour financer la rémunération des joueurs » puis « le taux de fréquentation des stades anglais est de 92,8% en 2007-2008 » ou encore « l’inscription du montant des honoraires (d’agents) sur tous les contrats à l’instar des pratiques anglaises »…).En passant, il écorne quelques « comptes et légendes » généreusement distillés par le président de la Ligue au fil du temps : d’abord qu’en ce qui concerne la répartition des droits TV, la situation est plus inégalitaire en France qu’en Angleterre ou en Allemagne ; un écart de 1 à 3 entre le premier et le dernier du classement en France contre 1 à 2 chez nos voisins européens. Mais surtout il tempère le mythe du retour triomphal à la rentabilité de la L1 : 47 millions d’euros de profit en 2006-2007 : pourquoi se croit-il autorisé à nous gâcher le plaisir d’une telle nouvelle en évoquant les 45 millions de subventions publiques et l’impact de 23 millions d’euros de l’exonération de charges sociales du droit à l’image collective sans lesquels le profit de la L1 ferait pâle figure